L’art
monumental à Givors au service du stalinisme Prenons
deux exemples. La
statue monumentale de « Louise Michel » aux Vernes et l’arc de
« triomphe » au pont de Chasse La
première a été réalisée par Georges Salendre, sculpteur
communiste qui a créé toutes les sculptures de pierre de la commune. Par
exemple, « Le Rhône » situé promenade Maurice Thorez. La
commande de Camille Vallin à Salendre était de
réaliser une sculpture monumentale représentant la Commune de Paris. Je n’ai
pas assisté aux discussions entre l’artiste et le maire, Camille Vallin, mais
ce que j’avance je le tiens de Camille Vallin lui-même. Telle était donc la
commande. Salendre
avait donc prévu de réaliser une sculpture de femme entourant de son bras un
fusil (la Commune était le fruit d’une lutte armée) et levant le poing gauche
vers l’est, là où se trouvait la patrie du « socialisme », l’URSS. La
sculpture était presque terminée. Elle était alors encore cachée derrière
l’échafaudage qui permettait à l’artiste de la réaliser. Quand
soudain Camille Vallin demanda à l’artiste de changer sa sculpture !
Sans doute avait-il été réprimandé par des instances staliniennes supérieures
pour l’aspect « dictature du prolétariat » de cette sculpture,
alors que le PCF abandonnait ce concept dans son programme… Alors
que l’œuvre était terminée, Camille Vallin obligea l’artiste à la
modifier !!! On peut s’imaginer le surcoût de cette demande pour la
commune de Givors. Il
fut donc contraint de sculpter une main ouverte au lieu du poing fermé et un
drapeau au lieu du fusil… Ce
qui donne à la sculpture cet aspect raté et ironique : elle a l’air de
faire un bras d’honneur en direction de l’est ! Le
deuxième a été réalisé par Patrick Raynaud. Lors de la commande, j’étais élu,
et j’ai assisté à toutes les tractations et discussions. Patrick Raynaud
était indépendant. Il n’était pas question pour lui de négocier la forme
artistique de son œuvre avec des politiciens. C’était comme ça et pas
autrement et si cela ne plaisait pas, cela ne serait pas réalisé… L’œuvre
fut réalisée, Camille Vallin souhaitant laisser à Givors une trace de son
passage par une œuvre monumentale, même si elle fut et est toujours très
controversée. Patrick
Raynaud donne une explication simple de la symbolique de l’œuvre : l’arc
de triomphe, (qui reprend la forme d’une arche du pont de Chasse) réalisé en
métal (qui devait être à l’origine de l’acier « rouillé » de
couleur rouge… mais cela a été abandonné, le symbole de l’effondrement du communisme
était trop clair), cette « arche », donc, représente l’industrie de
Givors. Cette industrie a été détruite, et cela est symbolisé par la
représentation du rocher qui serait tombé de la colline située derrière
l’œuvre, rocher qui écrase l’arc de
« triomphe ». Cette
arche, baptisé par Camille Vallin « arc de triomphe » n’est pas du
tout triomphal. Il est même plutôt le contraire… Patric Raynaud ne l’a jamais
nommé ainsi… D’ailleurs,
Camille Vallin n’en donnait pas du tout la même interprétation. Il expliquait
que l’arc de triomphe sortait de terre pour soulever le rocher… Aujourd’hui,
il est bien cabossé… C’est le sens donné à l’artiste qui triomphe ! Petite
anecdote, plusieurs militants communistes, et non des moindres, détracteurs
de l’œuvre, sont allés à son chevet le soir de la victoire des communistes
aux élections municipales de 1989, pour la dénigrer en manifestant
bruyamment… Voilà
donc comment le communisme enrôle l’art monumental à son service. D’ailleurs,
chacun peut faire le parallèle entre cet exemple de Givors et l’exemple du maire Front National
d’Hayange (57) qui s’est permis de modifier deux œuvres monumentales pour
satisfaire son idéologie. C’est
vraiment le PCFN ! Le
sort est d’ailleurs ironique, car Hayange est une ville ouvrière où j’ai vécu
toute mon enfance aux pieds des hauts-fourneaux… Mais
heureusement, nous sommes dans un Etat de droit, et chacun peut encore y voir
ce qu’il comprend et le dire, y compris le créateur lui-même… Y
compris le témoin que je suis. Alain Pelosato Givors,
le 19 novembre 2014 |